À boutte de Véronique Grenier

Un essai sur la fatigue chronique et ordinaire qui nous affuble tous. La fatigue nous prive de notre essence, de notre mémoire et de notre présence. Nous la combattons au quotidien depuis l’enfance.

L’autrice est consciente comme moi du point de bascule entre deux mondes que nous avons vécu au tournant des années 2000 quand le numérique a envahi nos vies. Avant nous avions des moments d’ennui, en attendant l’autobus, en lisant un long texte, en attendant un ami. Dès l’arrivée des téléphones intelligents et des réseaux sociaux tout s’est emballé. Nous avons vaincu l’ennui:

Yvon Rivard, dans Une idée simple (2010), écrivait: Nous avons combattu la panique ou le sommeil qui nous surprenaient au milieu d’une phrase trop longue ou d’un livre trop épais.

Pourtant les espaces de pleine solitude (ne parle-t-on pas de pleine conscience), d’ennui, ou ceux dans lesquels il ne se passe presque rien sont de moins en moins courants, mais nécessaires au repos. Nous nous fuyons constamment et ne tolérons plus ces moments seul avec soi-même.

À lire: The End of Absence: Reclaiming What We’ve Lost in a World of Constant Connection, Michael Harris, 2015.

Toujours connectés les gens supposent que nous sommes toujours disponibles.

Nos vies sont pleines. Nos agendas et nos calendriers en témoignent: on tétris les minutes pour venir à bout de nos objectifs; même les loisirs finissent par prendre la saveur d’un élément à biffer de la liste ou à coincer entre deux obligations. Regarder notre fatigue, c’est aussi regarder notre rapport au temps. Surtout celui qui manque, constamment.

L’humain est un animal étrange qui semble trouver satisfaction à surperformer et nous trouvons réconfort à surcharger notre horaire, car cela nous procure validation. Malgré l’aliénation et l’énergie qui se consume, on éprouve du plaisir à ce rythme de vie accéléré, pour reprendre les termes du sociologue Hartmut Rosa, à survoler les jours, à être efficace, occupé. (Hartmut Rosa, Accélération, La découverte, 2010.)

On gamifie notre temps et on décime nos check-list au travail comme à la maison.

Un fait inquiétant: 27% des diplômés universitaires sont analphabètes fonctionnels au Québec. (Paul Bélanger, professeur au Département d’éducation et de formation spécialisées de l’UQAM, dans Le Journal de Québec, 4 octobre 2016, article de Daphnée Dion-Viens).

Fatigue parentale

Sur la parentalité elle énumère tout ce qu’il faudrait faire si on suivait toutes les recommandations des spécialistes. C’est impossible et elle suggère d’apprendre à devenir des parents “suffisants”, de privilégier le temps de qualité et la relation, et le repos. Tout ne passera pas par nous pour l’éducation de notre enfant.

Fatigue des luttes

Perdre espoir en la possibilité de créer un réel changement peut mener à un désintérêt à l’égard de la lutte, désormais perçue comme vaine.

Au final

Au final il faut chercher l’apaisement plutôt que lutter contre la fatigue.