mutations
Nous sommes en constante métamorphose. Comme le scorpion qui change de carapace en grandissant nous revêtons par moments une nouvelle peau.
De mes trente-deux ans je vois déjà plusieurs versions de moi-même dans le rétroviseur, comme autant de carapaces laissées sur le bord du chemin. Autant d’histoires révolues. Autant d’aventures à raconter.
En arrivant à l’aéroport d’Halifax j’aperçus trois jeunes soldats prenant place au bar. Le regard complice du vieux serveur trahissait son passé militaire. Un sentiment trouble m’envahit alors. La nostalgie de mes neuf ans à servir sous le drapeau côtoyait le soulagement de ne plus porter l’uniforme. Autant mon service militaire façonna le jeune homme que j’étais, autant cette vie nuirait aujourd’hui à mon rôle de père.
Nous avons des identités complexes. Je suis l’amalgame de mes amours, mes échecs, mes voyages, mes parents, mes études, mon militantisme, mes lectures, mon enfance. On se croit achevé et pourtant.
Et pourtant il suffit d’une rencontre, d’un moment heureux ou d’une petite tragédie pour que tout bascule. Comme le scorpion nous délaissons alors notre peau craquelée pour revêtir la prochaine mieux adaptée aux intempéries. Refuser le changement c’est cesser de grandir.
La vie est une constante mutation et j’ai choisi de grandir pour faire face au vent.
En écrivant ce texte j’écoutais Ayub Ogada – Kothbiro.
Par Philippe St-Jacques